Etre tranquille ? Impossible !

Sarah ne se sentait pas très bien ce matin, il fallait qu'elle trouve quelque chose à faire. Le visage d'Emrys était en permanence dans sa tête et dans sa mémoire et elle n'arrivait pas à penser à autre chose. Mis à part la drogue, bien sûr.
Elle décida donc de sortir de son appartement pour trouver quelque chose qui pourrait l'occuper un peu.
La première chose qui lui vint à l'esprit fut la librairie. D'un pas spontané et donc non réfléchi, elle s'y dirigea, cherchant déjà dans sa tête vers quel auteur elle se tournerait aujourd'hui.
Une fois la porte du ' dicker order ' franchie, elle s'avança vers une rangée de livres qu'elle n'avait pas encore explorée. Elle attrapa un bouquin qui l'attirait et partit s'asseoir à une petite table réservée aux grands passionnés de lecture.
On ne pouvait pas dire que Sarah était une passionnée, d'accord, mais dans tous les cas, elle aimait ça.
Elle feuilleta les pages les unes après les autres, enfin intéressée par autre chose que par son premier amour.
Enfin, presque intéressée. Ce livre racontait l'histoire de deux amants qui se retrouvaient, quelques années après leur dure rupture.
Il y avait tous les moindre détails sur l'amour et le bonheur, la tendresse et la joie. Sarah avait connu tout ça, quelques années en arrière. Et ça la bouffait encore maintenant. Oui, parce que l'amour, ça rend heureux que pendant une petite période, après, la souffrance prend place. L'absence de l'autre est insupportable, le manque est insurmontable, la personne tant aimée irremplaçable. La solitude est la nouvelle alliée du célibataire amoureux. Et c'est ce qu'était maintenant Sarah. Une célibataire seule, nostalgique, triste et amoureuse. Elle avait comme l'impression qu'elle avait eu le droit à tellement de bonheur dans le passé, que maintenant on l'empêchait d'être heureuse. C'est comme si maintenant, elle payait pour toute la joie qu'elle avait ressentie avant. C'était une sensation vraiment très désagréable.

Elle ferma le livre et soupira. Elle ne méritait pas tout cet acharnement.
Elle se leva de nouveau et alla ranger le bouquin à sa place. C'est alors qu'elle croisa le regard d'une jeune femme rousse. Cette dernière la fixait étrangement. Discrètement, Sarah se regarda dans une vitre. Non, rien de spécial sur la visage, mis à part ces satanées cernes violettes qui ne voulaient pas disparaître.
Elle prit un nouveau livre, au hasard et partit se rasseoir à sa place. Doucement, derrière son nouveau bouquin, elle observa la jeune femme. Elle lançait toujours des petits regards suspicieux vers elle. Mais quoi à la fin ? Que voulait-elle ? Ca en devenait vraiment énervant !
Sarah essaya de se calmer, elle-même. Elle se plongea dans sa lecture, ou du moins elle essaya. Pendant quelques instants, elle ne regarda pas ailleurs.
Mais c'est alors que quelqu'un vint s'asseoir juste en face d'elle. Sarah n'osa pas regarder, il fallait qu'elle fasse comme si elle ne s'y intéressait pas. Immobile, elle lisait toujours. Elle ne dirait rien, elle ne regarderait nulle part. Elle voulait arrêter d'être paranoïaque, et faire comme si tout était normal.
Il fallait qu'elle joue l'indifférente, un peu comme d'habitude.
Elle se redressa, et respira un bon coup. Son livre était déjà plus interressant que l'autre. Celui- ci parlait de la haine.

Depuis plusieurs jours, Maxine résidait chez Emrys, suite au départ de son mari. Celui-ci avait besoin de prendre du temps, de savoir où il en était, voir si son mariage avait encore de l'avenir, et attendre l'annonce de Maxine au sujet de l'enfant. Un enfant, dont elle a appris il y a peu que son mari en était bel et bien le père. Et pourtant, malgré qu'il le soit, elle n'arrivait pas à se détacher de son amant. La jeune femme avait donc pris la décision de rester chez celui-ci pendant plusieurs jours, le temps de savoir si lui et elle, pourraient se supporter en collocation, mais aussi de pouvoir s'aider à faire un choix entre Emrys et Riley. Elle leur portait un amour différent, et si lui était possible de ne pas faire de choix, elle le ferait, seulement la situation avait assez durée.

Aujourd'hui, Maxine avait décidé d'aller au Dicker Order, une librairie qui lui permettrait de se renseigner sur la vie qu'une femme enceinte doit avoir pour le bien de son bébé, et puis, étant une passionnée de romans, elle ne manquerait pas l'occasion d'en emprunter un ou deux. Feuilletant quelques bouquins, dont elle en avait déjà deux ou trois sous le bras, elle venait à fixer une jeune femme. Elle la connaissait, elle en était sûre. D'où ? Il ne lui fallut que quelques secondes pour se rappeler d'une photo qu'Emrys lui avait montré, il y a quelques mois, une histoire d'amour qu'il l'avait beaucoup touché, datant de plusieurs années. Son prénom, déjà ? Su..Sa..Sarah, voilà. Elle espérait qu'il ne s'agisse pas de cette femme, là, cette femme dont Emrys avait porté beaucoup d'attention à son égard. Elle connaissait un morceau de leur histoire, une belle histoire qui s'était terminée plutôt tristement. Oui, Emrys partageait ses choses-là avec Maxine. Celle-ci s'était intéressée à son passé quand elle était tombée par hasard sur de nombreuses photos de sa vie passée. Essayant tant bien que mal, que de continuer sa recherche, la jeune femme ne pouvait pas s'empêcher de la défigurer. Une femme blonde aux traits plutôt fins, mais laissant exprimer de la fatigue.

C'était trop tard, elle l'avait fait. Maxine s'était installée en face de cette femme, elle devait savoir si c'était elle, cette Sarah. Celle-ci se redressait tout en soufflant un bon coup. Elle devait la prendre pour une folle, certes. « Sarah ? » Suite au regard étonné de la jeune femme, elle comprit que c'était elle. Elle s'apprêtait à ouvrir la bouche sûrement pour lui demander si elles se connaissaient, mais Maxine ne lui en laissa pas le temps. « On ne se connait pas, enfin, j'ai entendu parlé de vous par.. Emrys. » Déposant sur la table les trois bouquins qu'elle avait, un sur la grossesse, et deux gros romans que la jeune femme engloutirait en à peine la semaine. Une passionnée de lecture, voilà ce qu'elle était.

Au moment ou Sarah entendit son prénom prononcé, elle eut un frisson qui lui parcourut le dos. Cette jeune femme, qui l'avait un peu dévisagée connaissait son prénom. C'était un peu un choc, mais il fallait qu'elle essaye de comprendre. Elle pencha la tête pour regarder bien en face la jeune femme rousse. Celle-ci voulut s'expliquer directement :
" On ne se connait pas, enfin, j'ai entendu parlé de vous par.. Emrys. "
Emrys. Oulalala. Accélération cardiaque, frissons, sueur, tremblements... Sarah stressait maintenant. Décidément, cette jeune femme ne la mettait pas très à l'aise ! Comment pouvait-elle bien connaître Emrys ?
" Vous... vous connaissez Emrys ? Il vous a parlé de moi ? Mais, je ne comprends pas... Vous devez être assez proches non, pour qu'il vous parle de ce passé...? "
La seule idée de penser que cette femme pouvait être proche, voire très proche d'Emrys la déstabilisait encore plus. Oh non, elle ne voulait pas s'imaginer une chose pareille.
Mais après tout, que pouvait-elle se dire d'autre ? Emrys lui avait parlé de leur passé, une chose très intime pour lui, elle le savait bien. Cette femme ne devait vraiment pas être n'importe qui pour lui. Elle devait tout savoir !
D'autant plus qu'elle reconnaissait Sarah, alors il avait dû ressortir quelques photos. Sarah ne savait plus quoi penser. Enfin, jusqu'au moment ou elle baissa la tête.

Le visage de Sarah se décomposa, tout d'un coup. Elle ne put s'empêcher d'ouvrir grand les yeux, et de blanchir. Elle venait de voir ce livre, sur la grossesse. La jeune femme l'avait emprunté. Sarah s'imagina le pire. Et si elle elle voulait avoir un enfant d'Emrys ? Ou pire, et si elle était enceinte de lui ? Sarah n'en cru pas ses yeux. Elle avait l'impression d'être dans un tourbillon infernale, et que l'enfer était proche. Là, elle avait envie de se lever, de partir en courant, de sortir, de fumer, ou pire que cela... de se droguer, pour changer. Elle voulait oublier, zapper totalement le moment présent. Sarah releva la tête, afin de regarder la jeune femme dans les yeux, et d'écouter sa réponse. Cependant, elle avait quand même la vue brouillée, et les yeux humides.
Une douleur refaisait surface. Même si elle n'était pas sûre de tout ce qu'elle avançait, elle avait mal. Comme ce jour ou il était partit, comme ce jour ou il l'avait laissée seule. Seule dans son monde détruit.