J’ai du mal à me dire que c’est terminé. Que ce n’était pas tant un mensonge que cela de considérer que tout a une fin. Après tout, les « il était une fois » doivent bien se terminer avec un point, aussi mauvaise la conclusion puisse-t-elle être. J’ai du mal à réaliser que je ne pourrais plus la serrer dans mes bras, que peu importe ce que diront les autres, rien ni personne ne parviendra à combler l’absence de sa présence. Elle n’était pas seulement une mère pour moi, elle était aussi celle à qui je parvenais à me confier, celle qui était toujours là pour moi, qui aurait déplacé monts et merveilles pour m’aider. A croire que c’était de trop, que la volonté de la garder près de moi pour toujours était un désir de trop. Alors comme ça, je devais aussi arrêter d’espérer. Si la vie n’est qu’éphémère, je peux enfin considérer que tout l’est. Le bonheur, l’amitié, l’amour. Toutes ces choses qui sont censées nous amplifier la vie, lui donner un sens unique. Au final, tout se révèle être un tissu de mensonges, fait pour les plus jeunes d’entre nous. Les empêcher de devenir réalistes à la fur-et-a mesure du rêve. Croyez-moi, nous sommes tous ainsi. On aime vendre du rêve. Le pire, c’est qu’on tend la main pour les prendre. On y croit sans doute. Quand les gens me demandent si je me suis malheureuse, je réponds d’abord par un silence. Une semaine après, ils auront la preuve de ma douleur à travers mes larmes. Parce que dans une semaine, ma mère se trouvera dans la terre, endroit où je ne pourrais jamais la voir. Ce sont ses yeux qui me manqueront le plus – avec elle, évidemment – parce qu’ils me rappelaient sans cesse que je n’étais pas invisible, que je ne faisais pas partie d’un univers seulement affabulés de dingues et de psychopathes. Je voyais à travers ses yeux, je voyais un monde que j’avais tellement imaginé qu’il me paraissait presque impossible de le savoir existant réellement. J’ai toujours été de ces enfants heureux, à qui tout sourit jusqu’au jour où on leur apprend que tout va changer du jour au lendemain sans que personne ne leur demande quoi que ce soit. Sans qu’ils n’aient demandé quoi que ce soit. C’est terrible, mais c’est ainsi. Je faisais partie de ceux-là. Lorsqu’à huit ans, on vous annonce que votre mère est atteinte d’un cancer, qu’il est impossible pour les médecins de le guérir, vous ne comprenez pas grand-chose à ce qui est entrain de se passer concrètement. La seule chose dont j’étais réellement certaine était qu’elle me manquait déjà même si sa présence se faisait toujours sentir entre les quatre murs de cette grande maison londonienne.