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Failed projects on paper plane | reserved

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Failed projects on paper plane | reserved Vide


MessageSujet: Failed projects on paper plane | reserved Failed projects on paper plane | reserved EmptyMer 13 Avr - 11:02

Failed projects on paper plane | reserved 261796emmawill

Infernal : c'était définitivement le terme approprié pour décrire une telle routine. Des réveils difficiles aux soirées épuisantes en passant par les cases « cours » et « couches-culottes », les journées s'enchaînaient à un rythme épuisant, semblables et interminables à la fois. S'il était parvenu à s'y faire un tant soit peu, la résignation et les vagues de bonheur que lui apportait désormais sporadiquement la situation insolite dans laquelle il s'était retrouvé quelques mois plus tôt ne l'empêchaient pas de se poser de temps à autre une question douloureusement récurrente : qu'avait-il fait de sa liberté? Une erreur inconsciente et tout avait basculé, la nouvelle de sa paternité emportant dans un imparable tourbillon tout ce qu'il était parvenu à bâtir jusqu'alors. Il avait longtemps attendu que la mère de l'enfant réapparaisse, avec l'espoir de lui rendre son bien une fois le jours venu; mais malgré tout l'acharnement qu'il avait mis à nier les sentiments qui s'éveillaient en lui, Bliss était peu à peu devenue une part de son existence. Une part capitale qu'il se surprenait à rechigner à partager. Preuve en était la scène qu'il avait faite à la mère de la petite lorsque cette dernière s'était enfin décidée à se montrer.

Mais pour l'heure, il était loin de ressasser les frustrations qui l'assaillaient presque à longueur de temps depuis quelques mois. Rentré bien plus tôt qu'à son habitude, il avait relayé celui qui jouait le rôle de baby-sitter pour sa fille lorsque Joy ne pouvait pas le faire, sans même avoir le temps de lancer la fameuse conversation restée en suspend entre eux depuis le jour de l'embauche : qui était exactement ce garçon? Pourquoi lui semblait-il si... familier? Will n'avait eu de cesse de se promettre de lancer le sujet dès que possible, mais aucune occasion ne s'y était prêtée jusqu'à présent. Et ce soir n'avait pas fait exception à la règle : ce n'était pas pour le plaisir qu'il courait d'un bout à l'autre de l'appartement depuis près d'une demi-heure, sa gamine sur le bras, une cuillère en bois dans l'autre et le téléphone coincé entre l'oreille et l'épaule. Situation ridicule s'il en était; dans son malheur, il avait au moins la chance de ne compter aucun témoin à sa déchéance – parce que oui, il considérait la crise qu'il traversait comme tel. En deux mots : visite paternelle. Cela avait été prévu depuis... des lustres. Environ un mois, à vrai dire – c'était ce qu'il fallait pour caser un nouveau rendez-vous quelque part entre les pages encombrées de l'agenda du sieur Salinger. Sauf que l'information s'était soigneusement casée quelque part dans la mémoire de Whilem... avant d'être rendue invisible par une multitude de préoccupations plus urgentes. Et voilà que le jour-J s'était pointé sans crier gare.

Whilem jura, pour la énième fois, dans sa barbe inexistante en se demandant pourquoi diable il n'avait pas songé à commander un repas comme prévu. Pire : pourquoi son casse-c.. pied de père avait-il souhaité le voir à l'appartement plutôt qu'à un quelconque restaurant? Oh, il connaissait la réponse à cette question. Le plaisir sadique de le voir se démener entre ses devoirs d'hôte et sa fille, sans doute. Fille qui ne cessait de pleurer et hurler à s'en arracher les cordes vocales depuis des longues minutes sans qu'il ne parvienne à trouver ce qui pouvait bien clocher. Il en venait presque à souhaiter que ses cordes vocales finissent pas lui faire défaut et l'oblige à se taire. Presque. En totale contradiction avec son soit-disant souhait, soudain inquiet qu'elle puisse se « blesser » à force de cris, il jeta un coup d'oeil anxieux au fond de sa gorge exposée en s'attendant presque à la voir irritée. Encore une idée stupide. C'était fou comme cette petite avait le don de le faire se comporter comme le dernier des abrutis... surprotecteurs.

En rentrant de l'université ce soir-là, il s'était subitement rendu compte de l'invitation qu'il se devrait d'honorer à peine quelques heures plus tard. La malchance étant apparemment au rendez-vous, les restaurants et autres services de traiteurs qu'il avait alors contacté pour se faire livrer des plats s'étaient avérés surchargés de travail – sans compter sa propre tendance à faire la fine bouche devant ce qu'il considérait comme de la cuisine manquant cruellement de qualité. Bref, entre ses exigences trop élevées vis-à-vis des uns et l'incapacité des autres à assumer sa commande et la livraison qui la suivait, il s'était finalement retrouvé à devoir se débrouiller par ses propres moyens. Whilem se souvenait bien avoir pensé un instant que c'était de l'ordre du faisable. C'était avant que Bliss ne se découvre une vocation d'arrache-tympans et qu'une employée de l'institut psychiatrique ne se décide à le réquisitionner pour lui parler de l'avancement des soins de sa mère. Il ne pouvait décemment pas l'envoyer paître – c'était de sa mère qu'il s'agissait, bon sang. Mais l'employée lui avait si bien accaparé l'esprit qu'il avait laisser cramer sa sauce. L'odeur et la fumée s'étaient propagées dans l'appartement clos avant de s'estomper peu à peu, faisant tout de même redoubler les plaintes de sa fille – qu'il ne pouvait même pas envisager de pauser un instant, c'était dire à quel point la campagne de persécution à laquelle elle se livrait ce soir était intense – et sonner l'alarme anti-incendie pendant une minute qui lui avait paru être une éternité. Point positif : la cruche au téléphone s'était finalement rendue compte qu'elle dérangeait et avait eu le bon sens de proposer d'appeler plus tard. Point négatif : il était de retour à la case départ, avec à son compte un malus de dix bons points.

En désespoir de cause, il avait composé le numéro qui lui venait directement en tête depuis qu'il avait la charge de son enfant : celui de Tallulah. Elle avait été un peu outrée – bien que peu étonnée – par le « Bliss, ferme ta gueule un peu, tu veux? » qu'il avait fini par lâcher, à bout de nerfs – malheureusement sans succès – mais avait consenti à lui dicter par téléphone une recette supposément rapide et simple (au diable les goûts excessivement luxueux de son très cher géniteur). Sauf qu'il n'en avait pas entendu la moitié et que le résultat auquel il était parvenu était... comment dire? Douteux. Mais maintenant qu'il tentait de la joindre de nouveau, il tombait systématiquement sur sa messagerie. Comment se faisait-il que tout le monde soit débordé justement ce soir-là? S'il avait été superstitieux, il aurait sûrement mis son manque de vaine passager sur le compte du chat noir qu'il avait croisé en rentrant. En fait, il se sentait pratiquement en cas de le devenir – superstitieux.

Ce fut le moment que choisit la sonnette à l'entrée pour retentir. Bien qu'excédé, il prit soin de se composer un air digne et distant avant d'ouvrir.. pour se retrouver nez à nez avec la dernière personne qu'il s'était attendu à trouver un jour sur le pas de sa porte. Kylista. Un concentré de souvenirs au goût vaguement amer, qu'il avait mis derrière lui depuis un moment déjà... et à la tête qu'elle tirait, sa visie n'était apparemment pas dictée par la simple courtoisie. Son portable sonna au même instant, et les traits fermés du jeune homme se percèrent d'un simili sourire masquant son exaspération.

« Entre », offrit-il après une légère hésitation, bien qu'il eut l'impression d'ouvrir la porte aux problèmes en faisant ce geste.

Il tourna les talons sans attendre de vérifier qu'elle le suivait ou non et mais décrocha trop tard. Un nouveau message vocal provenant du bureau de son père. Il jeta un coup d'oeil à sa visiteuse pour le moins inattendue et renonça à essayer de couvrir les pleurs de Bliss. À la place il fit un signe en direction des fauteuils du salons, visibles par-delà le bar qui délimitait la cuisine tout en la laissant ouverte aux pièces attenantes, pour l'inciter à se mettre à l'aise tandis qu'il consultait ses messages – chose qu'il aurait repoussée à plus tard s'il ne s'était agi d'un cas de force majeure. Bingo. La secrétaire le mettait tranquillement au courant que son père était, une fois de plus, resté coincé à un rendez-vous, et ne pourrait donc pas l'honorer de sa présence comme prévu. Whilem tenta de se retenir, mais ne put s'empêcher de rire jaune. Son père avait la fichue habitude d'attendre le dernier moment pour faire savoir qu'il annulait tout. La mâchoire crispée, partagé entre soulagement et cuisante déception, il posa un peu brusquement le téléphone et.. Bliss venait de lui saisir un doigt pour se le fourrer dans la bouche, se taisant soudain. Sous la pulpe de son index, il pouvait sentir la gencive enflée et finit par comprendre pourquoi elle n'avait pas cessé depuis tout ce temps : elle faisait ses dents. Pourquoi ne s'en était-il pas aperçu plus tôt? Avec un regard d'excuse en direction de Kylista, il s'éclipsa quelques minutes dans la chambre d'enfant, le temps de lui glisser un hochet dans la bouche pour lui donner autre chose à mordiller que ses phalanges, puis revint finalement sans elle au salon.

Il n'était pas en présence d'une inconnue. Certes, la jeune Clanders était loin de pouvoir porter le titre d'amie, mais elle était néanmoins une connaissance de longue date. Aussi Whilem ne prit-il pas la peine de soigner les apparences outre mesure et se contenta-t-il de se laisser tomber lourdement dans un fauteuil en face d'elle, l'observant curieusement à travers ses paupières à demi-closes.

« Qu'est-ce que tu viens faire ici? », demanda-t-il à la fois sans animosité particulière et sans tact particulier, sans savoir s'il devait être curieux d'entendre sa réponse ou croiser les doigts pour qu'elle se taise plutôt.
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