« let us die young or let us live forever. We dont hαve the power but we never sαy never, sitting in α sαndpit, life is α short trip, the musics for the sαd men. ♪ » .

Maman,je t'écris pour te dire que je pars. Oui, c'est décidé, je m'en vais. J'ai bien souvent cherché une occasion de partir, de quitter ce quotidien triste et effroyablement monotone. Je me suis souvent demandé quand je devrais partir, ou de quelle façon la réalité finirait par me frapper. Cette réalité, elle m'a sauté ce matin dans les bras et elle m'a dit « Myles, j'en ai marre, je veux plus rester ici. » Cette réalité s'appelle Joyce, et elle m'a ouvert les yeux. Cette réalité, c'est ma petite sœur et celle dont je suis raide dingue.

Quand elle m'a dit ça, je dois bien avouer que je n'ai pas compris le message tout de suite. J'ai cru que c'était encore une fois une de ces nombreuses plaintes, l'une de celle où elle rabâche encore et encore qu'elle en a marre d'être trop jeune, d'être la plus petite, et d'être celle qui n'peut jamais sortir. J'ai cru qu'elle voulait juste qu'on fasse le mur ensemble, ou alors au moins que je la couvre. Parce que malgré notre majorité, Ils nous l'ont bien dit ; Tant qu'on sera sous leur toit, majeurs ou pas, on reste là. Ils nous on bien élevé tu sais, maman. Je m'apprêtais à lui proposer une sortie ciné, pour blaguer. Mais, de toute évidence, elle n'avait pas fini sa phrase. « J'étouffe, et cette vieille routine me crève. J'ai l'impression d'avoir quarante ans ! J'ai fait mes valises. » Le choc a été brutal. Le regard grave, j'ai perdu un instant mon regard dans le sien, le cerveau noyé dans mes songes ; est-ce qu'elle venait vraiment de dire ce qu'elle avait dit ? Ou alors l'avais-je simplement rêvé, avais-je donc juste imaginé cette scène ?

Elle m'a tapé sur l'épaule avec sa force de mouche, et elle a claqué des doigts à quelques pauvres millimètres de mes yeux ; elle m'a habilement sorti de ma rêverie. J'aurais voulu lui répondre quelque chose d'intelligent, un truc qui l'aurait fait douter du premier coup, ou ne serait-ce qu'un truc malin qui l'aurait fait réfléchir. Je suis Myles. « Et tu vas vers où, alors ? Paske si tu fonces au sud, tu vas crever sur place si tu trouves qui fait trop chaud ici.. Donc moi j'te proposerais bien l'Alaska, mais y paraît que l'meurtre des licornes est banni, et comme nous on est des oufs', on risquerait d'en butter une ou deux en voiture, donc si on veut pas s'faire emmerder, vaut mieux qu'on n'y aille pas.. On enlève le nord et l'sud, y doit bien nous rester d'autres endroits mais.. » La dérision. La carte du sarcasme est mon meilleur atout, maman. Tu sais, je n'sais pas si c'est toi qui m'a légué ça, mais qui que ce soit, ma foi, il aurait pu s'abstenir. J'allais continuer, mais elle m'a coupé la parole, pris entre quatre yeux et a lancé, dans un magnifique soupir, bien qu'un brun hésitant ; « Viens avec moi.. Viens avec nous... » Je n'ai pas su quoi lui répondre. De nouveau, je m'apprêtais à lui sortir une connerie, parce que c'est probablement la chose que je fais le mieux dans ce genre de situation. Sauf que j'ai laissé un silence s'installer, de nouveau pas bien certains d'avoir compris. A vrai dire, j'ai eu peur d'avoir vu la vérité, peur d'avoir à l'affronter.. J'ai fait demi-tour sur moi-même, lui tournant ainsi le dos, histoire de ne plus avoir à lui faire face. J'ai baissé la tête, frotté mes yeux. Un long soupir a glissé instinctivement au long de mes lèvres ; d'un seul coup, je n'sais pas comment, la fatale question est sortie toute seule, sans demander la permission. « Et dans le "Nous", j'dois comprendre toi et ton indien ? L'bizut débile et immature qui sort tout droit de l'université ? » J'avoue que j'ai eu du mal à cacher ma jalousie, mais quand ça te bouffe à l'intérieur, ça fini forcément par se voir. Elle devait savoir depuis longtemps que son connard-là, je ne l'aimais pas. Mais elle ne devait en aucun cas se douter du reste, du fait que si cette jalousie me rongeait autant, c'était simplement parce que je tenais trop à elle pour la laisser tomber dans les bras du premier connard venu... Elle s'est approché de moi, elle a posé une main dans mon dos, l'autre a rejoint la mienne ; une véritable scène de couple, à la différence qu'on était légalement frère et sœur. C'est la dernière fois, et probablement aussi l'une des premières, qu'on était si proches. Probablement qu'elle a eu peur de ma réaction.. Elle a simplement glissé sa tête contre mon épaule, et au moment même où j'ai senti son cœur battre tout contre moi, j'ai compris. Il y a eu ce déclic, là, d'un coup, au moment où nos cœurs se sont mis à battre à l'unisson.

Assis sur cette chaise, la main fatiguée de tout ses mots, je contemple le funeste spectacle qu'est ma vie. Ce soir, j'ai compris quelque chose, maman. Déjà, j'ai compris que le fameux "Nous" en question n'était autre que Joyce et Midnight, l'unique grand frère que je déteste adorer. On part après-demain. Juste le temps de réussir à fermer toutes ces grosses valises et de regarder un dernier épisode de Lost ; paraît qu'ils en sont qu'à la saison trois, en Australie. J'ai compris aussi que ma vie n'avait aucun sens. J'ai compris que je n'avais jamais eu aucun but, et me battre pour aucune cause ne pas réjouit plus ; je bouge, et l'avenir me dictera la suite.

Mais j'ai compris deux autres choses, maman. La première ? Que Joyce Elena Stewart est la femme de ma vie, que je la suivrais n'importe où. Quand elle m'a dit ça, tu sais, je n'ai pas hésité une seule seconde ; elle aurait même pu me proposer de partir avec son bizut que j'y serais allé, juste parce qu'elle est toute ma vie. Parce que je suis fou d'elle, oui maman, je suis tombé amoureux de ma petite sœur. Tu peux bien avoir honte de moi, tu sais, parce que si j'étais à ta place et pas à la mienne, c'est ce que je ressentirais ; de la honte. M'enfin tu me diras, à ma place aussi, j'ai honte. Pas honte d'être ce que je suis aujourd'hui, non. Honte de toi, de vous. Parce que tu sais, maman, l'ultime chose que j'ai comprise, aujourd'hui, c'est que tu m'avais bel et bien abandonné. J'étais seul, et les Stewart ont été là pour m'accueillir. Ils avaient déjà fait pareil, un an auparavant, avec Mid', et ils allaient refaire pareil avec Joyce, peu après mon arrivé. Tu sais, maman, j'ai longtemps cru que tu avais fait ça par bon sens, que, comme chaque être ignoble qui abandonne son gosse, tu avais des raisons à la pelle. J'ai réalisé que tu n'étais qu'une de ces salopes qui ne réfléchi à rien. Oui maman, je te parle comme ça, et ne me blâme pas à cause de mon vocabulaire, parce que tu l'as bien cherché. Tu n'as jamais été là pour moi. J'y croyais, enfant, je me disais qu'un beau matin, une grande femme brune et élancée frapperait la porte de la maison, une mine incertaine, elle ferait un pas dans ma maison, et un pas dans mon cœur. J'y ai cru pendant longtemps, et la déception a été à la hauteur de ton abandon. Ça fait un an maintenant, maman. Un an que j'ai croisé ton chemin, ta route. Pas ta vie, non. 365 jours durant lesquelles j'ai cru mourir à chaque seconde. Tu sais, j'ai compté les heures qui me séparaient de toi, avant de me rendre compte qu'on n'avait rien à voir. Tu n'es pas ma mère, à mes yeux tu n'es pas même une inconnue ; t'es morte, maman. Tu as brisé ma vie. Je ne suis pas ce salaud qui brisera la tienne, mais crois-moi, si tu es si naïve que tu en as l'air, quelque le fera à ma place prochainement, et peut-être même qu'il l'a déjà fait. J'ai envie d'te dire ; Tant mieux. Tu ne m'importes pas, maman. Et alors, aujourd'hui, j'aurais pu regretter de t'avoir croiser, mais non. Une année entière après t'avoir rencontré, j'ai enfin réalisé que tu n'avais absolument aucune importance à mes yeux.

Voilà maman, c'est tout. Je vais cessé de t'appeler Maman, car tu n'es pas ma mère. Tu as beau être celle qui m'a donné la vie, jamais plus je ne t'appellerais comme ça. Je te hais comme on déteste difficilement quelqu'un. Alors, maintenant tu vois, je vais aller déchirer cette lettre, peut-être même la brûler. Ensuite, je remonterais dans ma chambre, et je remplirais de nouveau cette valise, en pensant à ce nouveau continent sur lequel je poserais les pieds, dans deux jours. Je veux t'oublier, tu sais. Gommer toute cette vie, tous ces souvenirs enfouies au fond de mon être meurtri. Je sais que ce ne sera pas facile, que ça ne se fera pas en un jour. Mais j'ai tout mon temps, maintenant ; j'ai une vie entière, si ce n'est plus. Et puis, tu sais, maman, au fond de mon être, je sais très bien que tu n'as jamais été qu'une illusion, un fantôme à peine tactile ; la chimère de mes songes..