▬ maison de sienna
Une nouvelle journée commençait. Habituellement, j'aurais grogné contre mon réveil matin qui m'aurait sortie d'un rêve dont je n'aurais jamais voulu me détacher, j'aurais réprimander la température, soit trop froide, soit trop chaude, et surtout, j'aurais encore lâché un juron en voyant mon réfrigérateur vide, puisque je ne serais pas passée au marché. Mais cette journée était différente des autres. J'éteignis mon réveil dans toute la sénérité qui puisse exister dans ce monde. La température ne semblait aucunement m'incommoder et je trouvai mon bonheur dans le frigo. Au début, rien ne me troubla, en voulant dire que je ne remarquai rien. Je chantonnai dancing with myself avec une gaieté incroyable et je ne me surpris pas le moins du monde à danser dans ma cuisine. Non, rien ne me semblait bizarre. Rien ni personne ne semblait pouvoir m'enlever ma bonne humeur. Je me fit couler un bon café et commençai cette journée en regardant un dessin-animé. Je ne regardais jamais de dessins-animés. Et puis, je détestais le café. Je veux dire, j'en achetais pour faire adulte, genre faire comme tout le monde et prendre un café en lisant le journal. Et puis je le faisais, ce café, chaque matin. Et à chaque fois, je le recrachais dans ma tasse. Mais, sans étonnement, je le bu cul-sec. Littéralement. Que m'arrivait-il ? Je ne semblais pas me poser de question puisque j'allai même jusqu'à m'en faire un deuxième. Après l'avoir bu également, je gambadai - littéralement - jusqu'à ma chambre pour m'habiller. Un haut coloré et des short, accompagnés de boucle d'oreilles assorties et d'un collier en forme de coeur qui ne me rappellait absolument rien - ça aurait dû, pourtant. J'attrapai mon appareil photo avec une agilité infinie et me précipitai dehors. Direction le Centennial Park rempli de clichés que personne n'aurait pensé pouvoir immortaliser.

▬ centennial park
J'avais prit environ une bonne trentaine de photos avant même d'arriver à destination. Le vieu couple sur le banc furent le premier dès que j'arrivai au parc. Ensuite le chien qui sauta pour attraper sa ba-balle. Puis moi, toute souriante, comme à ma non-habitude. Après une cinquantaine de clichés plus saisissants les uns que les autres, je m'assis en indien sur l'herbe et les regardai, un à un, mon iPod enfoncé dans les oreilles et jouant Plain White T's. Je me surprenais toujours de plus en plus à chaque jours. Mon agilité à saisir un moment, la capacité à ne pas prendre une photo de travers, tout se développait plus à chaque instant, à chaque cliché. Je souris en me voyant, puis soudain, je réalisai. Je ne m'étais jamais vue aussi souriante depuis... longtemps. Je zoomai la photo, aperçu une étincelle dans mes yeux, qui depuis des lustres ne s'était allumée. Cette étincelle de bonheur sincère, ce sourire à s'en fendre les lèvres. Pourquoi diable est-ce que tout cela me semblait aussi surprenant ? Avais-je... tourné la page ? D'un coup, en me demandant pourquoi j'étais heureuse, je décidai de ne plus m'en faire avec ça et de continuer à photographier. Tien, ce nuage était pas mal. Je dirigeai mon appareil vers ma gauche et pointai l'objectif vers un jeune homme en chemise à carreaux remontée au coudes. Il avait les mains dans les poches, une chevelure brune et une carrure musclée. À son insu, je le photographiai. Je pris différents angles de vue de lui, quand soudain il se retourna.

Mon coeur fit un bond énorme lorsque mon objectif croisa les yeux bleus de Lloan. Lentement, je sortis de ma cachette derrière mon appareil et fit face à mon ex. J'eus bien du mal à ne pas fondre en larmes et à me jeter sur lui en lui demandant pourquoi. Oui, pourquoi. Pourquoi m'avait-il laissée aussi sèchement, alors que je ne vis rien venir ? En tout cas, j'étais de bonne humeur ce jour-là, et même si cette dernière avait considérablement chuté depuis que nos regards s'étaient croisés, je restais d'assez bonne humeur, mais pas assez pour pouvoir lui parler sur le ton de la blague comme il venait tout juste de le faire.

▬ Sienna, salut. Tu sais qu'il ne faut pas prendre les gens à leur insu comme ça ?

J'eus bien envie de sourire et de continuer sur cette note joyeuse, mais je n'y arrivais tout simplement pas. Ma gorge était serrée et même si j'aurais voulu lui répondre, à ce moment-là je n'y serais pas arrivée. Les émotions se bousculaient et je ne savais pas du tout comment réagir. Je gardai le silence et baissai doucement les yeux. Doucement, les émotions se firent moins violentes et je pus prononcer quelques mots.

▬ Lloan. Ça fait... longtemps.

Je marquai une pause. Sensible comme j'étais, je me serais mise à pleurer si j'avais parlé plus longtemps. Le vent souffla et envoya quelques mèches de mes cheveux blonds dans mon visage. D'une main, je les ramenai derrière mon oreille, puis je fixa à nouveau Lloan, serein, souriant, comme si nous étions de vieux amis. C'était un mec, c'était tout à fait normal pour lui de ne pas être ravagé par l'amour. Il avait la capacité d'aimer, j'en avais la preuve, mais n'avait pas celle de pouvoir regretter, en tout cas, il n'avait pas la capacité de le montrer. Peut-être avait-il des remords, peut-être que non. À lui de me le dire, car tenter de deviner les sentiments et les émotions de ce jeune homme en particulier était ardu et il fallait beaucoup de patience pour arriver à le comprendre. Je connaissais Lloan par coeur, et ce, même après une année de séparation. Je sentis un froid s'installer pendant un instant. Incapable de le supporter, je m'adressai de nouveau à lui.

▬ Alors... qu'est-ce que tu deviens ? Du nouveau dans ta vie ?

Demandais-je en montrant un soupçon d'enthousiasme qui n'était absolument pas sincère. Je me perdis alors dans son regard que jamais je ne m'étais lassée d'admirer. Encore aujourd'hui, j'appréciais toujours de pouvoir fixer ses yeux avec rêverie. Je savais qu'il étudiait le cinéma, nous allions même à la même université. Je savais quels couloirs il empruntait, ainsi je pouvais l'éviter en tout temps. Du coups, j'ai réussi à l'éviter pendant un an, tandis que lui n'avait aucun effort à faire pour ne pas me voir. Je crois même qu'il m'aurait ignorée si nous nous étions croisés. Enfin, il était là, devant moi, et sincèrement, c'était très, très bizarre.

Lloan regardait toujours Barthelea attendant une quelconque réponse de sa part ou même ne serait-ce qu'un regard. Il se sentait bête de lui avoir parlé de cette manière, c'était tellement enfantin, enfin tellement lui. Il n'arrivait pas à être sérieux très longtemps. Je vis dans ses yeux chocolats qu'elle avait retrouvé son habituel bonne humeur. Intérieusement, il était heureux qu'elle l'aie oublié, il ne voulait plus qu'elle souffre comme il l'avait fait souffrir, il y un an. Sienna meritait le bonheur et pas d'un goujat comme Lloan qui avait eu le culot de coucher avec sa soeur jumelle. Même bourré c'était impardonnable, et il se s'était pas pardonné.

Le vent souffla et Barhelea remit ses cheveux blonds derrière son oreille, à l'époque il adorait le faire et par la même occasion carresser son visage aussi doux que la peau d'un nouveau né. En la regardant, il reconnut la jeune femme dont il était tombé amoureux, son visage candide et son sourire angélique se marriant à merveille avec sa cheveleure blonde. « Lloan. Ça fait... longtemps » C'est vrai, ça faisait longtemps beaucoup trop longtemps au gout du jeune homme. Même s'il suivait des cours dans la même université, ils ne se croisaient jamais, au grand damn du brun. Il soupçonnait fortement la jeune femme de l'esquiver mais il ne pouvait pas lui en vouloir, après tout, c'était lui qui l'avait lachement quitté sans se retourner si aucune explication. Il regrettait beaucoup ce choix mais il mettait un point d'honneur à ne pas le montrer, se forçant à garder la face devant ses amis et surtout devant son ex petite-amie.

La situation entre les deux ex amants était très gênante, le fait ne plus s'être parlé après avoir partagé tant de choses. Ils avaient tellement de choses à se dire qu'ils ne savaient même pas par où commencer, sans parler des sujets à éviter. « Alors... qu'est-ce que tu deviens ? Du nouveau dans ta vie? » Question délicate. Que lui répondre? Qu'il se tapait des filles différentes tout les deux soirs ou qu'il pensait à elle presque à chaque secondes? L'une comme l'autre lui ferait mal en tant que réponse.

Le jeune homme replia son bras derrière sa tête, d'un air rieur mais tout aussi gêné et lui repondit en la regardant droit dans les yeux: « Écoute, tout va bien, on fait notre petit bonhomme de chemin, c'est dur mais on y arrive. Les cours, le boulot, les cours, le boulot. Donc on va dire rien de très nouveau. » Lloan voulait devenir réalisateur et cela demander beaucoup de boulot surtout qu'il avait beaucoup de concurrents à l'université et en dehors. D'autant plus que le monde du cinéma était assez bouché dans le pays. Il avait aussi fait allusion à la dureté de vivre sans elle et de leur séparation mais Lloan ne savait si Sienna comprendrais l'allusion. Cette réponse était moins débile que sa première réplique quoique toujours très vague. Mais il ne voulait pas la blesser plus.

« Et toi? Comment vas-tu? La photo ne te donne pas trop de file à retordre? » renchérit le jeune homme. Reegan savait que Barthelea adorait la photo et qu'elle prenait en photo tout ce qui bougeait ou justement ne bougeait pas. Il l'a trouvé très douée et n'avait jamais douté de son talent, même la jeune femme, au contraine, doutait de son propre talent. Lloan l'a destiné à de grandes choses et l'encouragerait toujours.