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Tu es loin d’être un ange, Charlotte… souffla-t-il derrière son oreille.
J’ai compris ton jeu d’ingénue…-
Et toi, ton jeu est-il celui d’un démon ? répondis-je en fermant les yeux, tandis qu’il déposait de doux baisers le long de mon cou.
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Non…Il fit tomber la bretelle de mon débardeur.
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Il est pire... princesse.Princesse. A combien d’autres filles avais-tu dit cela ? A combien d’autres pauvres filles avais-tu sorti cette tirade idyllique ? Combien d’autres filles étaient tes princesses ? Il est vrai que tu m'avais promis d'en être une, et tu as réussi, tu as fait de moi une
Princesse. Mais une
princesse déchue.
Cette histoire va commencer par le célèbre "Once upon a time". Mais ce n'est pas un conte de fée. Enfin, si, peut-être pour les détraqués et les gens qui ont une vie vraiment, vraiment pourrie. Aussi, n'y voyez là qu'un effet de style si vous pensez que j'exagère. Et j'exagère sûrement un peu.
Il était une fois une jeune femme appelée Eyleen Blackbird. C’était une jeune femme romantique, pleine de charmes, de rêves et de naïveté. A cause de ce dernier défaut, elle est tombée enceinte, pour mettre au monde presque neuf mois plus tard une petite fille aussi jolie qu’elle. Elle s’appelait Everild Charlotte Blackbird, et c’était une petite fille douce et rêveuse, mais aussi impulsive et franche.
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Il faisait quoi ton papa ?-
Mon papa ? C’était un enculé.-
EVERILD CHARLOTTE BLACKBIRD !-
Mais ‘Maaaan, c’est vrai ! C'est même toi qui l'a dit !Cette Everild. C’était moi.
Je suis née à Aitkin, une petite ville du Minnesota, qui compte pas plus de deux milles habitants. Là bas, il était clair que tout le monde connaissait tout le monde, et que dès que quelqu’un de nouveau arrivé, on était sûr d’en entendre parler jusqu’à ce qu’il devienne « un vrai habitant » de Aitkin. Des délires de mémés et pépés accro à leur trou perdu. En ces temps-là, j’étais une jeune fille timide et très réservée. Je ne parlais pas beaucoup, j’avais peu d’amis, mais je m’en fichais : car j’avais des livres. Des livres qui me contaient des aventures et des histoires extraordinaires. Et la plupart ne parlait que d’une chose : le grand amour. Des conneries d’enfants, et puis d’adolescentes. J’étais romantique à souhait, regardant presque du coin de l’œil l’autre bout de la rue pour espérer y voir arriver un preux chevalier. Voyez à quel point j’étais atteinte, à quel point je ressemblais à ma mère. J’étais pourtant certaine qu’elle n’avait simplement pas eu de chance, et qu’il n’était absolument pas susceptible que ça m’arrive à moi. Non, l’homme que j’aimerais m’aimerait aussi. Et nous nous aimerions à l’infini jusqu’à la mort.
Et patati et patata. Quelle conne. Pardon d’être vulgaire, je ne suis pas comme ça d’habitude. Non, en apparence, je serais un vrai petit ange. En apparence, je paraîtrais un peu fragile, un peu timide. Il n’y en a qu’un, qui m’a fait sortir de mes récits héroïques. Il n’y en a qu’un, qui m’a dévergondé et fait vivre comme jamais. Il n’y en a qu’un seul, qui m’a fait rire et sourire comme personne. Il n’y en a qu’un qui a fait réveillé en moi une vraie tigresse. C’était Seven. Il était arrivé l'année de mes quinze ans à Aitkin. Il arrivait d'Angleterre... Que dites vous ? Juste Seven ? Vous pouvez rire : je ne connaissais même pas son nom de famille. Ou alors, j’essaye de ne pas m’en souvenir. Pour éviter de le chercher, de le retrouver. De le supplier de me laisser une chance.
Une chance ! Comme si c’était à MOI de demander une chance ! Celui qui a fait une erreur, dans l’histoire, c’était lui. C’est moi, la victime dans tout ça. C’est moi qui aie souffert, pendant qu’il bavait sur une autre.
Une explosion agréable parcourait mon échine, le bout de mes orteils et l’ensemble de mon corps, me laissant soupirer de plaisir. Il s’écroula soudainement sur moi, épuisé mais très satisfait. Il murmura un « Waow » inaudible et puis m’embrassa, avant de s’éteindre à mes côtés, le sourire aux lèvres. Et puis, j’avais craqué.
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Je t’aime.Il avait tourné la tête si brusquement qu’il avait du se faire très mal, vu la grimace qu’il avait tiré. Il souriait d’une façon étrange, l’air mal à l’aise, se caressant avec désinvolture la nuque. Une bouffée de stress m’envahissait petit à petit, devant son silence, sa gêne. Et, au lieu de répondre, au lieu de me dire la vérité, il me fit un chaste baiser sur les lèvres, puis se dirigea vers la salle de bain.
«
Il a eu une hésitation. Il a pas l’habitude qu’on lui dise. Il a pas connu ça, il est orphelin, il connaît pas les mots d’attention de ce genre… ». J’aurais volontiers hurlé à mes propres oreilles un grand ‘
IDIOTE’. Toujours à lui trouver des excuses, même quand c’était impossible d’en avoir. Et, Soudainement, Seven était revenu, courant presque, sautant sur le lit, se retrouvant sur moi, me regardant intensément.
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Je t'aime aussi, Princesse.Ce surnom,
ce surnom ! Quelle torture pour mes oreilles, pour mon cœur, pour l'ensemble de ma personne ! Ça résonne durement dans ma tête et ça s'écrase contre mes poumons, m'empêchant de respirer et d'essayer de le chasser de mes esprits. Un mot banni de mon vocabulaire. Quiconque qui tente de me draguer en l'utilisant récolte une baffe et un énorme râteau. Je suis peut-être cruelle... Mais c’est ainsi. Chacun à ses faiblesses, ses peurs. J’en avais des peurs, à l’époque. Je le savais volage. Mais jamais autant.
Je n’avais que dix sept ans et notre relation durait depuis huit mois déjà. J’étais terriblement heureuse, il me semblait qu’il m’était fidèle, qu’il était amoureux de moi. Il était vrai que lorsque nous nous voyions, c’était rarement pour autre chose que pour le sexe. Mais ça me plaisait autant qu’à lui, qu’à moi. Il avait libéré en moi des fantasmes et des attentes toujours plus grandes, toujours plus belles. Nous faisions quelque chose que personne ne me pensait capable de faire. Je n’étais pas la même avec lui, et je crois que c’était finalement ce que j’étais réellement. Quelqu’un de spontané, de souriante, de franche et d’un peu séduisante.
Ce jour-là, j’étais rentrée avec une bouteille de champagne dans son appartement, voulant lui faire la surprise, évitant de faire le moindre bruit. En voulant accrocher ma veste au portemanteau, quelle surprise d’en voir déjà trois de pendus, d’une coupe loin d’être masculine. Juste à côté, le sien, sombre et toujours aussi neuf, était toujours à la même place. Je posais rapidement le mien sur le fauteuil et, parcourant le couloir le plus lentement possible, je commençais à sentir naître en moi une crainte immense. Des soupirs et quelques gémissements me parvenaient aux oreilles.
«
Dites moi que ce n’est pas ça, dites moi que ce n’est pas ça… » pensais-je à cet instant avec force. J’arrivais à la porte de sa chambre. J’entendis un gloussement terriblement féminin, terriblement coquin.
Ma main n’avait même pas besoin d’ouvrir la porte avec la poignée, à peine entrouverte, je la poussais avec une lenteur semblable à celle que j’avais opté pour traverser les quelques mètres qui séparaient mes doutes à cette réalité écrasante.
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Mes princesses..., susurrais-tu.
Je te voyais, entourée de trois jolies jeunes femmes, déjà assez dénudées. Je n’ai pas cherché à en voir plus. Et je crois que ton regard s’est accroché au mien pendant une seconde.
Je n’ai pas cherché à être discrète en partant. J’ai claqué la porte. J’ai claqué la porte à mes rêves, à mes espérances, à tes mensonges.
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Tu pars ? Mais où ça ? -
En Australie, Maman. Je t’appellerais tous les jours, promis.-
L’Australie ? Mais, mais, pourquoi ? Bredouillait ma mère, l’air penaude, me voyant préparer mes valises.
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Il y a une excellente université là-bas. J’y étudierais le journalisme. Je t’en avais déjà parlé, tu ne t’en rappelles pas ?-
Je sais ! C’est même moi qui te la conseillais ! Mais tu disais que tu ne voulais pas parce que toi et…-
J’ai changé d’avis, répondis-je rapidement.
J’ai alors relevé la tête, croisant ton regard compatissant et un peu triste. Je t’avais souris de toutes mes dents.
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Si tu as besoin de la moindre pièce, demande moi, j'ai le jackpot de ton père sur les bras.Je soupirais. Il était mort il y a un an, et avait pensé à ma mère sur son testament ! Il avait eu l’air de faire comme si je n’existais pas, se contentant d’un petit commentaire expliquant qu’elle avait été son premier amour et qu’il se devait de lui offrir un petit quelque chose. Petit quelque chose ! Pour lui, peut-être. Pour nous, c’était énorme.
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Il aura au moins servi à financer tes études !-
Je ne veux pas de cet argent.Voyant son visage se décomposer sous le choc de mon ton si différent et si agressif, je continuais d’une voix plus douce.
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Enfin… si je suis vraiment dans la panade, j’en utiliserais un peu.Mensonge. Je n’ai jamais voulu de cette fortune que je jugeais malhonnête, sale. Peut-être pensait-il qu’après toutes ces années, il allait se faire pardonner avec des billets ? J’avais envie de lever la tête et de lui dire « C’est pas tes dollars qui vont faire tout ce que tu aurais du ! ». Seven, je ne l’avais pas revu avant de partir, et c’était tant mieux. Je savais juste qu’il était toujours à Aitkin. Mais d’après ma mère, cela faisait un petit moment qu’elle ne l’avait pas revu.
Moi, pendant ce temps, j’avais trouvé rapidement un petit appartement dans les quartiers bon marché de Sydney, Potts Point. J’avais rapidement commencé à chercher un job, mais je n’ai pas réussi à dégoter quoique ce soit à proximité de mon appartement. Alors je suis allée plus loin, et je me devais de trouver rapidement. Un seul choix s’était imposé devant moi : le Streap Cross. Je devais payer mon loyer rapidement.
J’ai été embauché et le soir même, j’étais obligée de me trémousser devant tous ces hommes. J’y ai travaillé treize longs mois, avant de trouver ailleurs : à l’université même où j’étudiais. J’avais été engagée pour y faire le ménage, l’université manquant cruellement de personnes chargées de l’entretien. Sincèrement, je préfère tenir un balai plutôt que de m’agripper à une barre de strip-tease.
Ça été jouissif de démissionner de cette boite ! C'était comme retrouver une fierté nouvelle. Mais malgré tout, j'étais toujours retenu par Seven, même quatre ans après. Un peu désespérée ? Je l'admets... Je n'arrive toujours pas à l'oublier, et j'enfile les aventures. J'y arriverais peut-être un jour.
A trouver mon Prince.
lol.